Découvrir
Qu'est-ce qui dessille parfois nos yeux? C'est comme un voile tout à coup retiré. Se dissout, parfois douloureusement, un filtre qui transformait les couleurs, remaniait les formes, assourdissait certains sons.
Je parle de connaître les individus qui nous entourent, bien sûr.
Il en est pour qui on a une intuition immédiate, sans doute ceux qui sont assez sincères, plutôt entiers, spontanés. Apprendre à les connaître n'est pas pour autant un processus rapide. Ils peuvent rester imprévisibles mais dans l'ensemble, what you get is what you see, ils ne se déguisent guère.
D'autres se cachent davantage, se masquent, voire se cloisonnent dans un lacis labyrinthique. Peut-être s'y perdent-ils parfois eux-mêmes, d'ailleurs, à force de méandres, de détours, bloquant leur spontanéité pour contrôler leur image. Il n'y a pas exactement tricherie: chaque facette est exacte, correspond à un aspect de la personnalité.
Mais en même temps, un être humain est une globalité, une synthèse... Imaginons un corps dont nous verrions un jour les jambes, un autre les mains etc... Nous aurions une idée bien imparfaite de l'ensemble.
Et puis parfois, en plus, nous nous aveuglons nous-mêmes, nous refusons d'admettre ce que nous devinons par ailleurs, ce que nous savons tout au fond de nous. N'accusons alors pas l'autre: il faut nous retourner contre nous-mêmes, ou, en nous-mêmes, dirais-je avec plus de bienveillance. Si nous nous sommes abusés ainsi, ou laissé abuser, c'est qu'en nous une faiblesse, un besoin, un élan a pris le dessus, qu'il vaut la peine d'explorer.