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Menthe Froissée
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25 mai 2008

Prenez soin de vous... Sophie Calle à la BNF

Par ces mots se termine un e-mail de rupture qu'a reçu Sophie Calle. Ne sachant comment y répondre, n'étant pas sure de le comprendre réellement, elle a demandé à 107 femmes d'y réagir. Leurs ressentis donnent lieu à une exposition qui se tient salle Labrouste, sur le site Richelieu de la BNF. Daniel Buren en est le commissaire. L'expo a déjà été présentée à la Biennale de Venise l'an dernier.

Tout est rassemblé dans la salle de lecture aux tables et lutrins de bois, éclairés par les fameuse lampes traditionnelles à abat-jour vert. Sur les murs courent encore les anciennes étagères en casiers qui autrefois contenaient les ouvrages à consulter. Plafond haut, coupoles, ambiance érudite qui commande le respect.

Le visiteur circule sans itinéraire imposé et finit par comprendre que se mêlent lectures de la lettre et commentaires. Jeanne Moreau, Victoria Abril par exemple, sur la droite, une femme-clown désopilante vers le fond à gauche, chanteuses, danseuses... interprètent le texte à leur manière, et parfois en langue étrangère. Et puis avocate, juriste, comptable, spécialiste du savoir-vivre, ou même la mère de Sophie Calle, étudient le texte à leur manière. On peut saluer une traduction anglaise, assortie de "notes du traducteur" et une merveilleuse exégèse talmudique menée par les soeurs Abécassis, qui aboutit au 4ème niveau de lecture à TEKOU, "indécidable". Sophie Calle met en scène une séance de médiation conjugale imaginaire, la lettre occupant la place de son amant, tandis qu'elle répond aux questions de la médiatrice. C'est d'ailleurs le seul moment où elle intervient visiblement, car elle réussit le tour de force d'organiser une  manifestation qui la concerne intimement, sans y avoir contribué un seul mot. C'est son expo, mais rien n'est d'elle... sinon qu'elle est le "cerveau" de l'histoire: c'est à elle qu'ont été écrites ou dédiées toutes ces réponses, y compris le texte originel, bien sûr.

Le résultat est stupéfiant. Emouvant, d'abord, par exemple avec un travail d'écolière du CM2 ("Il dit qu'il aurait aimé que les choses tournent autrement. Cela veut dire qu'elles ont mal tourné" écrit-elle joliment) ou certaines lectures du texte. Souvent très drôle aussi, que l'on considère la rupture de contrat ou l'aspect stylistique, voire linguistique du courrier. Petit à petit se dégage une image peu flatteuse de son auteur. Il a dû se mordre les doigts, ai-je fini par penser avec un peu de compassion tout de même. On peut le dire, il en prend pour son grade. Belle vengeance, extrêmement raffinée... Heureusement, quelques voix s'élèvent tout de même pour le défendre , ou tout au moins fournir une approche, un éclairage différents. Et puis il se console aussi peut-être en se voyant le catalyseur d'une si forte opération...

La démarche de S. Calle est originale, mais après tout, pas si différente de celle que l'on trouve parfois sur les blogs, où l'on donne à commenter des morceaux de notre vie...

Et une dernière chose: j'aurais aimé avoir aussi le point de vue de quelques hommes... pour la bonne mesure!

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