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Menthe Froissée
Menthe Froissée
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23 septembre 2007

Mansfield Park

Mansfield Park, le roman de Jane Austen se déroule au tout début du 19ème siècle (il a été publié en 1814), et forcément se trouve un peu daté. D'où l'intérêt du film de Patricia Rozéma, qui dépoussière et met en valeur des questionnements toujours vifs aujourd'hui, portant sur la place de l'individu dans la société, et les traite avec un modernisme qui les éclaire. Par exemple, il établit dès le début un parallèle entre l'esclavage, dont vivent les riches Bertram, et celui qui soumet les femmes dans la société britannique. Ou encore il colore d'une explication psychanalytique le dévoiement du fils aîné qui tourne mal: manque d'amour, entre un père autoritaire et une mère devenue simplette à force de laudanum, traumatisme face à l'horreur des plantations.. Sir Bertram est un personnage intéressant parce qu'il évolue. Révoltant quand il veut forcer Fanny à épouser Henry, mais généreux quand il l'accueille; cruel quand il organise un bal pour la marier et lui clouer le bec, car elle est trop raisonneuse à son goût, et sincère dans son bonheur de la retrouver après une longue absence. Son amour pour son fils provoque une crise de conscience crédible. D'une manière générale, les personnages ont de la profondeur, et on les voit suivre et développer leur nature profonde. Tout en croquant la société avec humour, MP étudie en sourdine mais continûment un sujet grave, qui conditionne le bonheur: le Devoir, vis-à-vis de la société, de Dieu et de soi-même. Il aboutit à quelque chose comme "Devoir sans conscience n'est que ruine de l'âme" - je croyais que c'était "ruine de larmes" quand j'étais petite, mais ça colle aussi! Abdiquer sa liberté pour se conformer à une Loi rigide gravée dans le marbre brise l'individu, même si très consciencieusement il recherche le bien, poursuite admirable mais dangereuse si on ne sait pas le discerner. Céder à la pression sociale en espérant tirer discrètement son épingle du jeu, ou choisir l'amour et l'eau fraîche ne semblent pas non plus la panacée. Certains personnages chutent d'une manière ou d'une autre, d'autres trouvent le bonheur grâce à leur réflexion, leur pénétration et leur courage, leur force d'âme, leur persévérance. Jane Austen (et ce film) décrit très bien l'intelligence qui éclaire les personnages qui savent réconcilier raison, devoir et sentiments, et qui ne vont jamais contre eux-mêmes: la raison a tort quand elle vous force à vous renier. Plus facile à dire (et à écrire) qu'à faire. Mais enfin on se réjouit pour les deux héros, évidemment...
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