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Menthe Froissée
Menthe Froissée
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22 août 2007

Les Romans et la Vie (1)

Peut-on apprendre des choses vraies à partir d’un roman ?

Est-il légitime de citer une œuvre de fiction à l’appui de ses dires ?

La question est sensible pour moi, car les romans ont constitué pour moi la seule fenêtre ouverte vers le monde pendant les vingt premières années de ma vie. Ils n’ont pas seulement assuré ma formation culturelle, comme on l’entend au sens « cultivé » du terme, mais également intellectuelle et affective. N’ayant quasiment aucune vie sociale au sens traditionnel du terme, je n’ai longtemps connu des relations humaines que les péripéties des fictions que je dévorais. Loin d’évaluer la fiction à l’aune de la réalité, c’est au contraire le réel qui était examiné par rapport aux références romanesques qui avaient cadré ma vie. Par exemple, je ne prenais plaisir à visiter un château que si j’y retrouvais des souvenirs d’Alexandre Dumas. Ma première visite de Bath a été transfigurée par mes lectures de Jane Austen. Tout un univers s’incarnait subitement. Comme par un recul dans le temps, ce n’est pas le Bath moderne que je voyais, mais le décor d’une intrigue qui se déroulait sous mes yeux. Je vivais le roman, pas une étape touristique. Encore récemment, impressionnée par les rafales de brume qui tourbillonnaient autour d’un sommet, c’est Gandalf the White, du Seigneur des Anneaux, qui me donnait plaisir à avancer. Je me suis prise à admirer un chemin à l’herbe drue, verte et parsemée de pâquerettes, et corolles mauves, jaunes et roses parce qu’il semblait tiré des contes de Béatrix Potter. Quant à mon comportement en société, il a longtemps été dicté par les leçons tirées des aventures que je découvrais par héros interposés.

Inutile de dire qu’une fois immergée dans la société, c’est-à-dire dans le monde du travail (car auparavant j’étais parfaitement protégée dans l’univers de mes études exclusivement littéraires) j’ai ensuite eu un peu de mal à faire coïncider mes attentes avec celles des autres. La friction a parfois même été fort douloureuse.

Maintenant j’admets bien volontiers que la vie ne s’apprend pas dans les romans, « Ceci n’est pas une pipe », comme disait Magritte. Mais est-ce que le tableau ne nous en apprend pas tout de même un peu sur la pipe ?

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